mercredi 7 mai 2014

Le placement de produit dans les films d'animation

Le placement de produit est une pratique devenue courante dans le cinéma. Mais qu’en est-t-il dans le cinéma d’animation? Comment se manifeste-t-il? Y a-t-il sa place?

C’est aujourd’hui que sort sur les écrans français le film d’animation nord-américain “Les zévadés de l’espace” (“Escape From Planet Earth” en version originale), l’histoire de 2 frères extra-terrestres en mission sur Terre mais capturés par l’armée américaine. Même si sa sortie semble avoir été annulée en France, ce film reste néanmoins intéressant par la présence de placements de produits


Effectivement, dès la bande-annonce du film, j’ai été frappé par la vision d’un magasin de la chaîne 7-Eleven. Il s’agit d’une enseigne japonaise de commerce de proximité, très populaire, implantée en Asie, Australie, Amérique du Nord et Scandinavie. S’agit-il d’un placement de produit payant ou simplement d’une volonté d’inscrire l’histoire dans la réalité? Sachant que 2 consultants en placement de produits sont crédités au générique du film, je pencherais pour la 1ère hypothèse. Il faut se rendre compte également que ce magasin, très présent dans la bande-annonce, a l’air de prendre une place importante dans le scénario, ce qui ne laisse aucun doute quant à un éventuel partenariat financier. On voit même dans la bande-annonce dans sa version longue, le 2ème personnage principal boire un Slurpee, fameuse boisson vendue exclusivement par l’enseigne. Les 2 personnages principaux du film interagissent donc de manière remarquée avec la marque, ce qui en fait une collaboration diaboliquement efficace pour une exposition auprès du jeune public.



D’autres exemples de placements de produits dans des films d’animation existent. J’ai été marqué notamment par le film Coraline, sortie en 2009 et diffusé sur Arte l’année dernière. Dans ce dessin animé à l’univers sombre et finalement peu adapté à un très jeune public, la voiture familiale n’est autre qu’une New Beetle de Volkswagen. J’ai été assez surpris de voir une reproduction aussi fidèle du modèle, si bien détaillée, que ce soit l’extérieur comme l’intérieur, logo compris. Cet exemple m’avait à l’époque donné envie de rédiger ce billet en attendant d’autres exemples.


Voici les passages de la voiture dans le film. Je vous recommande de désactiver le son:




Du côté des productions Disney, on peut citer d’autres exemples de marques présentes. Celui, assez ancien de Bernard et Bianca, où la libellule qui propulsait la feuille transportant les 2 personnages se nommait Evinrude, nom d’une marque de moteurs de hors-bord. Ou encore dans Ratatouille, avec dès le début du film, des exemplaires de magazines de cuisine dont le chef Gusteau fait la couverture. Ces magazines, en l'occurrence Gourmet, Food & Wine, Bon Appétit et Cuisine at home existent réellement mais leur présence n’est peut-être pas le fruit d’un accord financier, puisqu’elle est justifiée par le scénario et le fait que ce sont des magazines concurrents.


Les cas des films Cars et Toy Story sont plutôt intéressants. Ce sont des films d’animation qui font intervenir des personnages qui sont eux-mêmes des produits existants (le Graal pour une marque souhaitant communiquer dans un film). Que ce soit sous forme de voitures ou de jouets, les marques y sont omniprésentes. Mais la diversité de ces marques concurrentes démontre davantage une volonté de la part des producteurs, d’ancrer les personnages dans un contexte réel. De plus, on s'aperçoit dans les films Cars, que les sponsors présents le long des circuits sont fictifs.

Autre cas particulier, celui des Simpsons. En effet, en représentant le quotidien d’une famille américaine, on s’attend logiquement à y rencontrer des marques. Ainsi, on retrouve dans la série aussi bien des marques réelles que fictives, qui sont généralement des clins d’oeil à des marques existantes. L’exemple le plus marquant est celui de la bière Duff. La marque, qui fait plus ou moins référence à Budweiser, est tellement présente dans la série que plusieurs brasseurs la commerciale désormais, la marque n’étant pas déposée par Matt Groening. A noter que le film adapté de la série a fait l’objet d’un partenariat avec 7-Eleven (évoqué en début de billet) à l’occasion de sa sortie avec des magasins transformés IRL en Kwil-E-Mart, la fameuse supérette présente dans la série. La pratique du placement de produit dans un film d’animation consistant à intégrer des marques réelles dans un contexte fictif est ici inversée puisque les marques fictives se transposent dans la vie réelle.


Alors, le placement de produit a-t-il sa place dans le cinéma d’animation? Je suis personnellement mitigé sur cette pratique dans le cinéma traditionnel tout d’abord. La présence des marques réelles dans un film a l’intérêt de crédibiliser une histoire en y associant des éléments de la vie réelle comme ces marques. Mais à partir du moment où les placements de produits deviennent omniprésents, racoleurs ou même anachroniques, le film perd en crédibilité artistique.
Pour ce qui est du cas particulier des films d’animation, le récit se plaçant dans un univers fictif, la présence d’éléments du monde réel comme les marques ne semble pas logique. Néanmoins, pour se rapprocher d’une certaine réalité, on peut retrouver des marques fictives qui peuvent faire référence à des marques réelles. Mais ce qui est problématique, c’est lorsque des marques réelles interviennent dans ce genre de films principalement destinés à un jeune public, moins méfiant et plus influençable par les messages promotionnels. C’est pourquoi j’estime personnellement que les films d’animation, qu’ils soient destinés aux enfants ou aux adultes devraient se limiter à un univers imaginaire sans influence publicitaire.


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